Après avoir moi-même cassé le prix des sites WordPress en arrivant sur le marché, j’ai pu constater les dégâts que cela engendrait sur tout l’écosystème.

Au travers de cet article, je vous propose d’éviter de reproduire les mêmes erreurs en apprenant des miennes. Que ce soit pour votre bien ou celui de la communauté.

Il vous faudra environ 23 minutes pour lire cet article

Beaucoup d’encre a déjà coulé sur le web au sujet des tarifs pratiqués par les prestataires WordPress. Et on entend de tout.

« Installer WordPress ? Mais ça prend 5 minutes ! Même 25 euros c’est trop cher. »

« Un site avec un thème premium vendu 30 000 € ? Mais c’est une arnaque ! »

Il faut dire que parler d’argent n’est pas facile dans un milieu où il n’y a pas réellement de normes. D’autant plus que l’ego des prestataires entre souvent en jeu et les frustrations de chacun remontent à la surface.

Mais j’ai tenu à relever le défi : parler de prix (attention, un gros mot !) et donner mon avis, quitte à en froisser certains au passage.

Cet article est le compte-rendu de la conférence qui s’est tenue lors du WordCamp Paris 2019. Avec un peu de recul, je me dis que le format « court » (20 minutes) n’a pas fait honneur au sujet tel que je voulais le présenter. Enlevez les contraintes de temps, le stress et les maladresses de langage et vous obtenez le matériau suivant.

POURQUOI CE SUJET ?

Il y a deux ans, j’assistais à la conférence de Thierry Pigot lors du WordCamp Paris 2018 qui s’intitule « Combien coûte un site WordPress ? »

Et j’en parlais dans mon article de débrief : j’étais resté sur ma faim et j’étais déçu que l’on ne parle pas de « valeur ».

Ce sont donc les points principaux que j’ai souhaité traiter à mon tour pour donner une autre vision de la facturation.

Je viens donc apporter ma pierre à l’édifice en essayant d’amener à un consensus là où il y a des prises de position souvent extrêmes.

Alors, comment se fait-il que certains facturent un site 500 € et d’autres 5 000 € pour un travail à première vue équivalent ?

QUI SUIS-JE POUR ABORDER CE SUJET ?

Suis-le commercial d’une agence ? Non.

Un freelance avec 20 ans d’expérience ? Non plus.

Je suis juste un « ex-prestataire » qui s’est beaucoup intéressé aux règles du jeu.

J’ai fini par les comprendre, j’ai même joué avec les règles « des meilleurs » puis je me suis lassé et je suis passé à autre chose.

Maintenant je ne vends plus mon temps ou mes services : mon expertise n’est disponible qu’au travers de mes projets (WPChef ou ElegantSchool).

Mais avant d’en arriver là, j’ai été indépendant pendant 3 ans.

J’ai lancé mon activité de freelance la fleur au fusil, en faisant des calculs savants pour fixer et justifier mes tarifs. Mais si je regarde en arrière, je me qualifie moi-même de guignol.

Vous allez comprendre pourquoi.

Mon premier devis était minable… mais il restait trop cher

Lorsque j’ai vendu mon tout premier site, c’était pour le père d’un ami. Quand on démarre c’est souvent comme ça : des membres de notre cercle personnel nous mettent en relation avec leurs contacts.

Cette personne faisait de la location de camping-car grâce à un site « fait en dur ». Il n’avait pas la main sur le contenu et voulait gagner en indépendance. WordPress était donc parfait pour refaire son site.

On parle donc d’une refonte de site avec intégration de tous les contenus (une dizaine de pages) à base d’un thème premium. Vous l’auriez vendu combien vous ?

(Je vous laisse quelques secondes de réflexion)

Et bien moi je l’ai vendu 275 euros à l’époque.

Et le client a tiqué en entendant le prix (véridique).

Le second devis était plus élevé… mais pas assez cher

Ensuite vint un second client : un artiste. Il lançait sa carrière solo et voulait montrer son univers ainsi que ses chansons grâce à un site.

C’était également l’occasion pour lui de proposer une newsletter à ses fans et de leur permettre d’acheter ses albums en direct. Et en plus de ça, il y avait également une galerie avec des photos issues de concerts ou de shoots photo.

La prestation était donc une création de site avec intégration d’une vingtaine de pages, le tout avec un thème premium, une newsletter, un formulaire de contact et un petit e-commerce.

Encore une fois, combien l’auriez-vous vendu ?

(Allez-y, vous avez encore quelques secondes…)

Je l’ai vendu 390 euros. Et cette fois-ci, à ma grande surprise, le client m’a dit que ce n’était pas assez cher.

J’aurais bien gonflé le devis mais il était trop tard, c’était acté.

390 euros avec 30% d’acompte.

Facepalm

Et là, l’incompréhension commence

Restons avec le Nicolas de l’époque si vous le voulez bien : il reste estomaqué de voir qu’un professionnel trouve un site à 270 euros trop cher alors qu’un petit artiste local lui dit qu’il ne facture pas assez avec un site à 390 euros.

Mais pourquoi ? Qu’est-ce qui explique ces deux mentalités différentes ?

Se pourrait-il qu’il ne soit pas suffisant de juger un client à partir de son activité ? Qu’il faille creuser un peu plus ? Ou est-ce juste un problème de personne ?

J’ai exploré cette question dans les années qui ont suivi. Je me suis formé pour avoir des réponses à mes questions et surtout, pour mieux facturer.

Parce que si un particulier dit à un professionnel qu’il ne facture pas assez… C’est qu’il y a quand même un problème.

Voici donc les conclusions de ces quelques années d’expérience.

LA CLÉ ? VENDEZ AU BON PRIX !

Et non au JUSTE prix.

Des projets en apparence identiques ne méritent pas des devis similaires. Tout dépend du client.CLICK TO TWEETLe problème serait en effet de croire que l’on peut calculer un tarif en fonction du livrable qu’on nous demande.

Clairement, il faut aller plus loin. Il faut prendre en compte non seulement le projet que l’on vous confie mais également le client avec ses croyances, son expérience et sa trésorerie.

Quelque part, on peut dire qu’il n’existe pas de norme qui serait applicable à tous les projets. Ça, je n’y crois pas.

(Pourtant vous le verrez, il faut quand même des normes dans un marché)

C’est pourquoi il faut plutôt aller dans la direction du BON prix. Et c’est plutôt simple :

C’est le prix qui vous convient et qui convient au client.

Point.

Donc quelqu’un qui veut un service minimum sera satisfait d’une offre low-cost. Et quelqu’un qui souhaite développer son entreprise sur internet trouvera son compte en payant les honoraires d’un consultant sur plusieurs mois.

Il y a donc des clients, des projets et des prestataires différents. Et il y a un marché pour tous.

D’un même brief de départ on peut arriver à des devis totalement différents.

Pour comprendre cela, si l’on se place d’un point de vue extérieur, il suffit de voir qu’il y a bien trois composantes :

  • Le brief du projet, qui peut être interprété de différentes façons ;
  • Le positionnement du prestataire, low-cost, milieu de gamme, haut de gamme… ;
  • Et pour finir le client, avec ses expériences passées dans le web, sa connaissance de WordPress, ses rêves de grandeur…

Pour établir un devis, il faut donc étudier ces 3 facteurs.

C’est aussi pourquoi j’ai très vite refusé de donner des prix à la volée.

Découvrez pourquoi ! [+]

Donc la première règle à suivre pour bien fixer vos prix… C’est de refuser de les fixer dans un premier temps.

Commencez par enquêter pour être sûr de livrer le BON prix.

Mais ce n’est pas tout, il y a un concept encore plus important à comprendre.

COÛT < PRIX < VALEUR

On arrive à un point « définition », désolé. Ce n’est pas la partie la plus fun.

Quand Thierry Pigot disait dans sa conférence « Combien coûte un site WordPress ? » il s’adressait en réalité aux clients. Pas aux prestataires.

Alors qu’au contraire l’article que vous lisez en ce moment est destiné aux freelances et aux agences.

Donc faisons le point entre 3 mots qui ont des sens bien différents et qui, lorsqu’ils sont utilisés pour un prestataire, devront respecter l’ordre suivant : coût < prix < valeur.

Pour le comprendre, voyons chacun de ces termes séparément.

Le coût d’un site internet

En faisant un rapide calcul, un site vous coûte un hébergement, un nom de domaine, un certificat SSL, des thèmes et extensions… Puis votre temps.

Par contre selon que ce dernier soit pour vous, pour un projet bénévole ou pour un client, il n’aura pas le même prix ! Retirons donc le temps de l’équation si vous le voulez bien.

Il ne reste plus que l’hébergement, le nom de domaine… un site coûterait donc moins de 100 € par an.

Sauf qu’à ce prix-là rien n’est installé ou configuré : il y a juste les différents éléments et il faut encore les assembler !

Donc lorsque l’on parle de coût d’un site internet, il faut bien se mettre des deux côtés :

  • Pour le prestataire, c’est une liste de dépenses ;
  • Et pour le client, c’est le prix qu’il va payer.

Le prix d’un site internet

Appelez-le prix ou tarif, on arrive au même résultat : c’est le montant de la transaction qui est convenu entre le prestataire et le client.

Comment le fixer ? Je vais le développer dans la suite de l’article.

Mais il nous manque un terme à définir avant ça.

La valeur d’un site internet

On arrive là sur un terme que l’on a pas l’habitude de rencontrer dans le milieu du web mais qui me tient à coeur parce que je viens du marketing : la valeur.

Un site internet est un outil de communication, un outil commercial même, et il a un but : faire gagner ou faire économiser des ressources.

Un exemple évident est l’argent :

  • Une e-boutique a pour but de vendre des produits ;
  • Le site d’un freelance va lui apporter des prospects qui deviendront éventuellement des clients.

Et ce, sans intervenir personnellement à chaque fois. C’est donc un système qui crée de la valeur 24h/24, 7j/7 une fois qu’il est mis en place. On peut donc même dire qu’il nous fait économiser du temps.

Allons encore plus loin : il nous évite d’embaucher un commercial, d’investir du temps en prospection, de dépenser des frais de publicité, des frais de représentation sur des salons professionnels…

D’une manière générale on arrive très bien à imaginer ce que l’on gagne avec un site mais pas ce que l’on économise. Pourtant cela existe bien.

Prix dun site pour une institution

Et qu’en est-il des associations et des institutions ? Ceux qui ne font peut-être pas de chiffre d’affaires avec leur site ?

Et bien c’est la même chose, cela ne leur fait peut-être pas gagner des ressources mais cela leur en fait économiser.

Un site associatif peut ainsi automatiser la gestion des adhésions alors qu’il faut peut-être l’équivalent d’une personne à mi-temps pour le faire habituellement.

Le site d’une mairie peut, quant à lui, diffuser des messages et répondre à des questions courantes sans pour autant avoir plusieurs personnes assignées à un bureau d’accueil ou à un standard téléphonique.

Lorsque l’on est capable de déterminer les ressources gagnées ou économisées, on arrive à la notion de valeur.

Par exemple, un site fera gagner 100 € de chiffre d’affaires par jour, tout en économisant l’embauche d’un commercial (admettons que le salaire chargé soit de 3 000 € par mois).

Si on fait le calcul sur un an, cela représente plus de 70 000 € de gains et d’économies cumulées. Et sur deux ans, pas loin de 150 000 €.

Avec ces chiffres en tête, à combien vendriez-vous ce site ? Ah oui, cela nous fait totalement changer de perspective.

On y reviendra tout à l’heure.


Ainsi nous venons de voir trois définitions : coût, prix et valeur.

Chacune est un point de départ différent,
c’est pourquoi elles donnent lieu à…

3 MÉTHODES DE TARIFICATION

Selon que vous partiez du coût, du prix ou de la valeur créée estimée, vous n’arriverez pas au même résultat.

D’un même brief, vous aurez des projets et des tarifs bien différents.

Mon but ici est de vous exposer ces méthodes avec leurs avantages et inconvénients puis nous verrons lesquelles sont les plus appropriées.

La tarification à la marge

Cette première méthode se base sur vos coûts. Le prix est ainsi fixé de la façon suivante :

Prix = Coûts + Marge

Donc il suffit de faire la liste de vos dépenses (nom de domaine, hébergement, licences, loyer, imposition…) d’y ajouter une marge et vous aurez votre prix de vente.

Et quelque part c’est la méthode que l’on retrouve souvent dans les calculateurs de taux journalier ou les articles pour fixer vos tarifs .

On nous demande le salaire désiré, notre taux d’imposition, les frais essentiels à l’activité, le nombre de semaines où l’on souhaite partir en vacances…

Mais avec un tel calcul, on va avoir d’énormes disparités :

  • Quelqu’un qui vit d’amour et d’eau fraîche se sous-vendra ;
  • Quelqu’un qui vit encore chez ses parents et qui a l’ACCRE jugera qu’il peut sous-facturer ;
  • Un autre qui veut prendre 20 semaines de vacances par an pourra avoir des tarifs exorbitants…

On fixe donc des tarifs sans même se soucier du travail accompli. On s’imagine un niveau de vie et (tadaam !) cela nous donne un taux horaire ou journalier.

Fixer ses tarifs ? C'est de la magie !

Peut-être suis-je trop libéral mais pour moi cela n’a pas de sens.

Le client veut réaliser un projet, il paie donc pour une prestation. Celle-ci sera plus ou moins professionnelle, plus ou moins rapide, plus ou moins pédagogique…

Et ce sont ces attributs qui doivent faire partie du prix. Ce n’est pas votre loyer ou votre taux d’endettement.

Le client n’a pas à savoir tout ça. Il n’a pas à payer pour vos choix personnels. Ce qu’il veut c’est un résultat.

Votre tarif professionnel n’a pas à être influé par vos décisions personnellesCLICK TO TWEETEt pourtant, c’est cette méthode l’on voit bien trop souvent appliquée.

Pour moi, c’est clairement la moins bonne. Mais elle a un avantage indéniable quand on débute : elle est rassurante et tangible.

Mais elle se base sur les mauvais éléments de départ, à mon avis.

Le résultat c’est que l’on a énormément de personnes qui se sous-vendent. Cela pose un problème parce qu’en « cassant les prix » (malgré eux), ils ne desservent pas l’écosystème. Bien au contraire.

C’est ainsi que des prestataires qui vivaient honnêtement de leur activité, voient de nouveaux entrants faire n’importe quoi… Et les clients sont satisfaits de voir que les prix descendent, qu’il est possible de s’en sortir à moindre coût.

Les mentalités évoluent et très rapidement il est admis qu’il ne faut plus payer « l’ancien prix » mais le nouveau.

On assiste alors à de la destruction de valeur.

Je vous déconseille donc fortement d’utiliser cette méthode pour chiffrer vos projets.

Allons voir la suivante, qui est déjà un peu mieux.

La tarification par rapport aux prix du marché

Dans ce cas-ci, le tarif que vous facturerez sera ancré autour de prix psychologiques ou pratiqués.

Prix = Coefficient x Prix pratiqués sur le marché

Et selon le coefficient que vous appliquerez, vous vendrez une prestation plus ou moins chère que les autres acteurs.

  • Si vous facturez plus cher, vous sous-entendez que vous allez faire un meilleur travail ;
  • Et si vous facturez moins cher, c’est peut-être parce que vous avez automatisé certaines tâches ou que vous donnez moins de soin à certains aspects du projet.

Mais dans les deux cas, vous jouez dans un cadre. Et c’est là un avantage : cela évite de détruire de la valeur. Ou en tout cas cela minimise les erreurs que l’on peut faire lorsque l’on débute.

Ancrer son prix

Ancrez-vous aux prix du marché et c’est la sérénité assurée !

S’il est admis qu’un petit site vitrine sans grande prétention se vend 1 000 euros (c’est un exemple, ne me sautez pas à la gorge), alors on viendra se placer autour de ce prix.

Plus cher ou moins cher, c’est à vous de voir ! Mais on sera ancré. Et on évitera d’aller trop haut ou trop bas.

  • Les freelances qui débutent y verront l’opportunité de facturer un peu moins cher que leurs concurrents déjà bien installés, tout en allant à des niveaux de prix qu’ils n’auraient pas espéré atteindre s’ils avaient suivi leur calcul de coût ;
  • Et les freelances plus aguerris sauront se positionner plus haut en mettant leur savoir-faire et leur expertise en avant.

C’est une situation plutôt saine sur un marché. Mais l’inconvénient, parce qu’il y en a un, c’est qu’il faut rester dans un cadre.

Ceux qui voudraient en sortir, notamment ceux qui souhaitent facturer plus, se trouveraient limités.

Et c’est justement là où la troisième méthode entre en jeu.

La tarification par rapport à la valeur créée estimée

Mais qui sont ces personnes qui souhaitent casser les règles d’un marché en facturant plus cher ? Comment font-elles ?

Et bien c’est assez simple : elles sont conscientes de la valeur qu’elles créent. Puis elles facturent en conséquence.

Leur prix est composé de deux facteurs : la valeur créée estimée et un pourcentage de rémunération.

Prix = Valeur créée estimée x Commission

Pour que vous compreniez bien ce qu’il se passe dans la tête du client, je vais vous donner une illustration.

Si je vous dis qu’en me donnant 1000 euros aujourd’hui vous aurez 2000 euros dans un an, me donnerez-vous cette somme ?

(On va mettre de côté la valeur actuelle nette (VAN) et l’actualisation, pour les plus financiers d’entre vous. L’exemple n’en sera que plus simple.)

Ici la valeur créée estimée est de 2000 euros (dans un an) et le pourcentage de rémunération est de 50%.

On retombe bien sur notre équation : Prix = 1000 € = 2 000 € x 50%.

Mais du côté du client, le retour sur investissement est de 100%. En donnant 1000 euros aujourd’hui, il récupère sa mise initiale et 1000 euros de plus à la sortie.

Comparez ce rendement de 100% (brut) et ceux qui existent dans l’immobilier ou dans le secteur bancaire (en dessous de 15%) et vous comprendrez vite l’attrait de cette méthode de vente.

L’intérêt est donc d’ancrer les prix non pas par rapport à un marché mais par rapport à une valeur créée estimée.

Faire des prédictions

À quoi ressemblera votre petite pousse dans un an ?

Cela demande donc de savoir faire de nombreux calculs pour imaginer la valeur que va produire un projet à une date donnée. Mais une fois que vous maîtrisez cette discipline, vous devenez le roi du monde.

Enfin presque. Il ne suffit pas de faire des estimations, il faut ensuite les matérialiser.

Est-ce qu’il est simple d’en arriver là ? Non.

Il faudra mêler du webmarketing et du contrôle de gestion sur des tableurs Excel pour déterminer des scénarios. Et on ne peut pas y arriver en un claquement de doigt.

La clé ? Monter en compétences.

L’avantage indéniable de cette méthode est qu’elle nous fait sortir du cadre. Elle est longue à mettre en place parce qu’elle s’applique individuellement pour chaque client et chaque projet mais elle est bien plus rémunératrice.

D’ailleurs on ne vend plus un « livrable » mais plutôt un « projet » dans sa globalité.

Dans votre devis il n’y aura pas marqué « Site internet de 5 pages + formulaire de contact + formation de 3 heures… ». Il y aura tellement de conseil et d’accompagnement, que le site en lui-même deviendra minoritaire.

Cela ne peut marcher que si vous savez créer de la valeur en actionnant les bons leviers. Il faut donc passer par du marketing et du webmarketing. Si vous vendez simplement du code ou l’installation de thèmes et extensions, cela ne marchera pas.

Cette méthode a un gros désavantage par contre : on peut perdre énormément de temps à faire des estimations, si l’on ne sait pas filtrer les bons projets des mauvais.

Découvrez une anecdote à ce sujet [+]

Il peut donc y avoir des projets passionnants mais qui ne créent pas suffisamment de valeur. Vous n’aurez alors pas suffisament d’honoraires pour effectuer votre mission.

On peut aller plus loin : dans le cas où certaines entreprises « survivent », il leur devient très difficile de se développer. Ils auront donc peu de budget à vous confier.

Ainsi, il y a des clients intéressants et d’autres non. Mais en plus de ça, un client peut avoir des projets intéressants et d’autres moins ambitieux.

C’est pourquoi tout ce travail de calcul, en amont, permet de juger de la profitabilité d’un modèle d’affaires ou d’un projet en particulier. Mais il faut aussi un peu de flair pour éliminer rapidement les mauvais projets.

Parce que oui, notre rôle est d’intervenir là où nous pourrons avoir le plus d’impact.

Vivez une carrière passionnante

Vous n’êtes pas d’accord ? Pourtant, si l’on n’intervient que sur des projets rentables et qu’on les aide à se développer, on a :

  • Des clients impliqués, ils ne feront pas les morts et ne traînerons pas pendant des mois pour vous livrer des éléments ;
  • Une rémunération à la hauteur de notre expertise, ce qui n’est pas possible sur des projets à l’avenir incertain ;
  • Des projets récurrents ou de nouveaux projets de la part des mêmes clients ;
  • Un bouche-à-oreille bien plus efficace parce qu’on aura réellement aidé nos clients à atteindre leurs objectifs.

Je ne sais pas vous, mais c’est comme ça que je conçois une carrière réussie.

Il y a également un renversement de situation qui s’opère : on n’est plus un prestataire externe « lambda ». On devient un partenaire, un développeur d’entreprise (business developer), un résolveur de problèmes.

Notre position face au client change, nos honoraires également. Et de son côté, ce n’est pas une dépense qu’il fait, c’est un investissement.

Il investit dans une vision, un projet, un prestataire. Et non pas dans un simple site.

Pour autant, cette méthode ne marche pas à tous les coups pour plusieurs raisons :

  • Tous les clients n’aimeront pas cette méthode. Et bien pas de problème : transformez votre pourcentage de commission en heures ou jours de travail. Cela fera peut-être un taux horaire ou journalier élevé mais tant mieux : cela montrera également votre différence par rapport aux autres.
  • Tous les clients ne sont pas égaux, vous ne pourrez pas aider tout le monde, c’est sûr. Mais je le vois comme un avantage. Dans une profession où notre ressource la plus importante est le temps, cela nous permet de ne l’investir que là où il sera utilisé efficacement.
  • Il faut avoir « le nez » pour dénicher les bons projets, avant même de s’embarquer pour des heures d’entretien et de calculs avec le prospect.
  • Les bons projets ne tombent pas du ciel, ils sont même rares. Il faudra les attirer à soi ou les chercher, mais dans les deux cas il faudra fournir de gros efforts de développement marketing et commercial.

Ainsi se termine l’aperçu des 3 méthodes :

  • La tarification à la marge (la moins intéressante) ;
  • La tarification par rapport aux prix du marché (un peu mieux) ;
  • Et la tarification à la valeur créée estimée (la plus complexe et intéressante).

Vous avez du commencer à entrevoir ce que vous pourriez changer pour mieux facturer. Mais est-ce approprié ?

QUELLE MÉTHODE CHOISIR ?

Pour moi il y a une évidence : il faut arrêter de calculer ses tarifs par la méthode de la marge. En partant de vos coûts, vous additionnez des fonctionnalités alors que le client veut un projet qui va bien au delà. Il veut des gains ou des économies de ressources.

Il reste deux méthodes : celle des prix du marché ou celle de la valeur créée estimée.

Si vous êtes un nouveau prestataire, dirigez-vous vers la méthode des prix du marché. Regardez ce que fait la concurrence, demandez autour de vous quels sont les prix psychologiques et positionnez-vous en conséquence.

  • Vous livrez un site plus rapidement que tous les autres ? Très bien, facturez plus cher !
  • Vous avez un service low-cost pour les artisans avec une sélection restreinte de designs ? Parfait, facturez moins cher !

Mais comparez votre offre à ce qu’il se fait ailleurs et positionnez-vous.

Certains me diront que les prix pratiqués à Paris et en province ne sont pas les mêmes. Que les entreprises de leur région ne sont pas prêtes à mettre ces prix-là.

Et bien vous avez plusieurs choix :

  • Adaptez-vous et faites une offre pour votre clientèle locale (moins de budget = une prestation moins complète, mais ça leur suffit peut-être !) ;
  • Éduquez vos clients pour leur faire comprendre le coût réel d’un site, le temps que vous allez passer dessus, ce qu’ils ont à gagner de confier leur site à un professionnel ;
  • Changez de cible, vous avez la chance de pouvoir travailler à distance et c’est un fonctionnement qui convient à de nombreux clients. Alors plutôt que de chercher des clients autour de chez vous, allez les dénicher ailleurs !

Mais si vous souhaitez passer à la 3ème méthode, il n’y a pas de secret…

Apprenez le webmarketing

Développez vos compétences

Si vous souhaitez facturer plus cher, il va falloir créer plus de valeur. Et donc il va falloir apprendre à le faire.

Est-ce que faire un code ultra-propre, ultra-rapide, bien commenté et évolutif crée de la valeur ? Oui. Mais pour une très petite cible : votre client doit avoir la même culture que vous.

Maintenant, si vous souhaitez créer de la valeur pour la grande majorité du marché, il va falloir répondre à leur demande sous-jacente : réaliser un outil de communication (le site) qui va répondre à leurs problématiques.

Et dans les entreprises, quels sont les services qui ont besoin de sites internet ? Les services commerciaux, marketing et communication, dans la grande majorité des cas.

Ce sont eux qui veulent toucher plus de personnes, enrichir une base client et développer le chiffre d’affaires.

Donc si vous voulez répondre à leurs besoins, il faudra parler leur langage. Il faudra comprendre ce qu’ils attendent réellement.

Et ils n’en ont rien à faire que vous fassiez du sur-mesure ou du thème premium : ils veulent du résultat.

Dans ce cas, formez-vous au marketing et au webmarketing afin de comprendre comment vous allez pouvoir les aider. Intéressez-vous au référencement, à l’emailing, aux réseaux sociaux, à l’optimisation des conversions, aux CRM…

Puis devenez un partenaire. Pas juste un prestataire externe.

 POURQUOI UN SITE WORDPRESS COÛTERAIT-IL MOINS CHER QU’UN AUTRE ?

Si tout le monde se met à utiliser la méthode des « prix du marché », cela rendra service à l’écosystème. Mais ce n’est qu’un début.

Il faut ensuite que les tarifs moyens conviennent au plus grand nombre. Hors aujourd’hui ce n’est pas le cas.

Comment se fait-il que lorsque l’on vend un site basé sur un autre CMS, ce soit plus facile ? Qu’on puisse le facturer plus cher ?

Pour autant, WordPress n’a pas à rougir. On peut en faire des choses fantastiques, bien au delà des blogs.

C’est pourquoi nous avons tous un devoir : éduquer les prospects et les clients aux vrais coûts d’un site internet et ce qu’ils sont en droit d’attendre au vu de leur budget.

Certains veulent un site vitrine juste pour faire acte de présence. Pourquoi pas. Ils pourront alors se satisfaire d’un projet à 1000 € ou moins.

Mais d’autres veulent bâtir leur entreprise ou développer leur activité. Et il faut bien leur faire comprendre que sans conseil, sans accompagnement et sans formation, ils vont droit dans le mur.

Un site internet n’est pas une finalité, c’est un point de départ. Ce n’est qu’après que le vrai travail commence, sinon c’est un outil inerte.

Rendez service à vos prospects et à vos clients : dites leur clairement à partir de quel budget vous pouvez réellement répondre à leur besoin.

Si vous avez compris qu’il veut atteindre tels objectifs (parce que vous aurez enquêté) mais qu’il vous fait un brief qui ne l’y amènera pas, dites-le lui. Montrez lui les étapes qu’il a oublié pour arriver à son but.

Il faut que la communauté WordPress parle d’une seule voix : nous pouvons faire des choses fantastiques. Nous pouvons créer des sites qui vont vous permettre de vous verser un salaire, d’embaucher, de vous faire connaître…

Réunion entre un client et un prestataire

Mais s’il vous plait, vous prospects, vous clients, vous devez nous laisser vous expliquer tous les tenants et aboutissants. Arrêtez de provisionner un certain budget pour un site, laissez-vous plutôt conseiller par des personnes qui en font leur métier.

Eux seuls sauront vous dire si votre vision et vos moyens sont en adéquation.

Et ne montez pas sur vos grands chevaux : un site internet peut devenir votre meilleur atout, il est donc normal que vous le payiez. Peut-être même très cher s’il vous évite d’embaucher des salariés.

Ne soyez pas avare lorsque vous présenterez votre brief. Ce n’est pas un site de 5 pages que vous voulez, c’est un élément de communication pour développer votre activité.

Alors parlons de votre vision, de vos problématiques, de vos besoins… Et ne tirez pas de conclusion avant d’en avoir parlé avec un consultant.

RESSOURCES COMPLÉMENTAIRES

Les slides de la conférence

Obligation de moyens / obligation de résultats

Je parlais dans ma conférence d’obligation de moyens et non de résultats pour les professions libérales.

Il se trouve qu’après plusieurs discussions après la conférence ainsi que des recherches complémentaires, je ne vous conseille pas de jouer à ce jeu.

La jurisprudence nous montre en effet que pour les professions techniques (mais libérales quand même), l’obligation de résultat sera plus souvent appliquée. C’est notamment le cas des architectes.

Donc lorsque vous calculerez la valeur créée estimée de votre projet, ne dévoilez pas vos chiffres à votre client. N’allez pas lui dire que vous allez créer 10 000 € de valeur ce qui explique pourquoi vous demandez 2 500 € d’honoraires.

Impliquez-le dans l’étape d’enquête pour connaître ses motivations, ses objectifs, ses coûts, ses revenus… Mais pas plus.

Par contre, dans la présentation de votre projet, n’hésitez pas à montrer en quoi tous les dispositifs que vous avez imaginé vont répondre à tous ses points de douleurs.

Vous ne livrez pas un site, mais la solution à ses problèmes.